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Les lectures de Sole
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10 mars 2008

Jean Teulé, Je, François Villon

teul_Ah que voilà un roman dérangeant... Mais commençons par le commencement.
De Villon, que savais-je? Pas grand-chose, le minimum inhérent à mes études de romaniste: son importance en tant que poète, sa vie délurée et dangereuse, le mystère autour de sa "disparition" et son oeuvre. Surtout.
J'ai des souvenirs de La Ballade des pendus:

De notre mal personne ne s'en rie
Mais priez dieu que tous nous veuille absoudre


De celle des Dames du Temps Jadis, passages d'une beauté nostalgique:

Qui beauté eut trop plus qu'humaine ?
Mais où sont les neiges d'antan ?

Ce n'était pas si mal ce que j'en savais donc. Mais rien qui m'eût préparé à ce que j'ai lu là! Je me suis retrouvée prise dans une déferlante de violence, de sexualité débridée et d'inhumanité assumée. Jean Teulé brosse un portrait -magnifique s'il en est- de ce moyen âge si peu connu. Je ne discuterai pas ici le caractère scientifique de l'œuvre, peu m'importe finalement, mais quelle force, quelle énergie dans ce roman. Bien sûr au service de l'horreur, une ignominie sans nom. Mais est-ce un problème? Baudelaire parlait de faire du beau avec l'horreur et c'est bien ce à quoi parvient Jean Teulé.

Mais revenons à ce roman. Nous suivons un Villon qui hésite entre la vie paillarde que son statut d'étudiant et la bonté de son tuteur lui permettent et l'horreur et l'abomination des Ecorcheurs et des Coquillards. Et il choisira. Lors d'une scène où culmine l'inhumanité de ce personnage. Une scène que je pourrais dire d'anthologie si elle ne m'avait pas définitivement éloignée du personnage. Définitivement, parce que si je peux, comme l'explique avec brio Katell, comprendre le cheminement qui le mène à cette extrémité, dans ce Paris où vie et mort ne pèsent pas bien lourd, j'ai été dépassée par l'horreur, l'injustice de cette scène. Une déferlante de haine lorsque Villon assiste, immobile, au viol bestial d'Isabelle.
Par la suite, les douleurs, malheurs vécus par notre personnage, son supplice entre les mains du bourreau me ramèneront à un regard moins distancié et dégoûté. Jusqu'à la fin. Mais reste cette horreur que je n'avais jamais lue et éprouvée aussi intensément.

C'est un roman que ne peut pas laisser indifférent. Je peux comprendre le rejet de certains lecteurs, le refus de cette explosion d'immondice. Je peux aussi comprendre l'attraction pour un personnage comme Villon. Il me reste à moi une vision très forte de cette époque, l'impression d'une plongée cinq siècles en arrière. Je ferme le roman, heureuse de vivre aujourd'hui.

Cette lecture m'a été proposée par leclub_des_bloggueuses . Voir les autres critiques chez Sylire.

 

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Commentaires
X
Ahhhhh! Content de lire ta très bonne critique et de voir que le livre t'a intéressée. (Et je ferai remarquer que j'étais le premier à te le recommander!). Et puis n'oublions pas que si horreur il y a, elle est mise à distance, par l'écriture. Mes élèves qui ont choisi de le lire sont évidemment touchés, interpellés, mais (il leur en faut plus...) aucunement choqués.
F
Très belle analyse, je n'avais jamais lu de telles horreurs également, mais grâce à la puissance de l'histoire je suis restée accrochée à ce livre que je ne suis pas prête d'oublier !
N
Bon on sait que Villon n'était pas un saint mais quand même je trouve que Jean Teulé a l'imagination un peu débridée pour combler les zones d'ombres....Mais bon c'est mon point de vue !!
P
J'ai le même avis que toi et je suis également éxtremement heureuse de vivre aujourd'hui !
A
Ton billet est super même si je ne relirais pas pour l'instant Teulé ! <br /> J'ai donc lu une autre biographie !
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